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Lutter contre le revenge porn

I- Quelle est la définition du revenge porn ?

 

La pratique dite du revenge porn (= vengeance pornographique ou porno-vengeance) consiste pour une personne à diffuser auprès du public ou à un tiers des contenus à caractère pornographique concernant une autre personne, dans le but de l’humilier en dévoilant son intimité.

 

C’est bien la diffusion au public ou à un tiers de ces contenus particuliers, sans le consentement, de la victime qui est sanctionnée pénalement.

 

Par ailleurs, l’infraction de revenge porn est effectivement consommée lorsque que les contenus ont été diffusés :

–       par l’envoi d’un sms ou d’un mail ;

–       sur internet ;

–       sur une publication sur les réseaux sociaux (Tiktok, Facebook, Instagram, Snapchat,etc.).

 

Enfin, le Législateur entend par « tout enregistrement ou tout document portant sur des paroles ou des images présentant un caractère sexuel » : à savoir des photos intimes, des vidéos intimes ou encore des sextos (= des propos à caractère sexuel rédigés à titre privé).

 

 

II- Comment réagir en présence d’un cas de revenge porn ?

 

   •  Pour les victimes mineures :

 

– 1ère étape : les parents doivent avertir leurs enfants des conséquences et risques qu’ils encourent en envoyant des contenus pornographiques

 

A titre préalable, il incombe aux parents de faire de la prévention en discutant avec leurs enfants afin de les responsabiliser sur le danger de l’envoi de tels contenus.

 

Il s’agit de les informer sur les conséquences (à court et long terme) des risques pris par ces derniers : un partage malveillant de ces contenus par des tiers ; une réputation ternie de l’enfant et a fortiori de sa famille ; des difficultés de retirer les contenus litigieux sur internet ; etc.

 

Si l’enfant est d’ores et déjà victime de faits de revenge porn, il est alors indispensable pour les parents de le rassurer, de le soutenir, de le déculpabiliser et enfin de l’accompagner dans les démarches tendant à mettre un terme à l’infraction.

 

En effet, il est très important de ne pas laisser le mineur seul.

 

 

– 2ème étape : Les parents doivent alerter l’établissement scolaire de leur enfant victime

 

Il revient à l’enfant victime ou à ses parents ou à tout témoin direct de prévenir immédiatement la direction de l’établissement scolaire (école, collège ou lycée) dès lors que l’auteur du revenge porn est également un élève.

 

A cet égard, tout membre du personnel éducatif (surveillant, enseignant, proviseur, etc…) ayant connaissance de faits de revenge porn doit avertir sans délai le procureur de la République, en lui communiquant tous les renseignements relatifs aux faits litigieux.

 

Les parents de l’enfant victime peuvent également solliciter un changement d’établissement scolaire, en saisissant la Direction Académique des Services de l’Éducation Nationale (DASEN).

 

 

– 3ème étape : Les parents doivent déposer plainte auprès des services de police ou de gendarmerie nationale

 

Le revenge porn est une infraction délictuelle.

 

Dès lors, les parents de l’enfant victime disposent d’un délai de 6 ans à compter de la commission des faits pour se rendre dans un Commissariat de police ou dans les locaux de gendarmerie nationale, et y déposer plainte au nom de leur enfant, soit contre X (auteur des faits inconnu) soit contre l’auteur ou les éventuels complices.

 

Lors du dépôt de plainte, il est important de remettre aux services de police ou aux gendarmes toutes les preuves de l’infraction, et notamment des captures d’écran des photos, des vidéos ou des sextos ayant été diffusés au public.

 

 

– 4ème étape : Les parents doivent surveiller les réseaux sociaux de leurs enfants

 

Les parents de l’enfant victime doivent immédiatement procéder au signalement en ligne des contenus à caractère pornographique sur les réseaux sociaux (Facebook, Snapchat, Instagram, etc…) ou à la plateforme du site, afin d’arrêter leur diffusion.  

 

Il est également possible de procéder à un signalement sur le site du ministère de l’Intérieur suivant : https://www.internet-signalement.gouv.fr/

 

En outre, il faut rapidement bloquer le ou les auteurs de la diffusion des contenus litigieux.

 

De la même façon, l’article 17 du Règlement UE 2016/679 offre la possibilité d’obtenir l’effacement des données personnelles litigieuses en ligne (photos, vidéos, textes…) : il s’agit du droit à l’effacement.

 

 

   •  Pour les victimes majeures :

 

Il est recommandé à la victime majeure de déposer une plainte pénale, de procéder au signalement en ligne et de solliciter l’effacement des données personnelles, selon les modalités ci-avant décrites aux étapes 3 et 4.

 

 

III- Quelles sont les sanctions pénales passibles pour les auteurs de faits de revenge porn ?

 

La loi du 7 octobre 2016 a créé l’article 226-2-1 du Code pénal définissant l’infraction de revenge porn.

 

Cet article dispose :

« Lorsque les délits prévus aux articles 226-1 et 226-2 portent sur des paroles ou des images présentant un caractère sexuel prises dans un lieu public ou privé, les peines sont portées à deux ans d’emprisonnement et à 60 000 € d’amende.

Est puni des mêmes peines le fait, en l’absence d’accord de la personne pour la diffusion, de porter à la connaissance du public ou d’un tiers tout enregistrement ou tout document portant sur des paroles ou des images présentant un caractère sexuel, obtenu, avec le consentement exprès ou présumé de la personne ou par elle-même, à l’aide de l’un des actes prévus à l’article 226-1. »

 

Ce délit est puni d’une peine de 2 ans d’emprisonnement et d’une peine de 60.000 euros d’amende.

 

A côté de cette infraction, il est important de préciser que le Législateur a également souhaité sanctionner pénalement :

 

–       le fait, en vue de sa diffusion, de fixer, d’enregistrer ou de transmettre l’image ou la représentation d’un mineur lorsque cette image ou cette représentation présente un caractère pornographique d’une peine de 5 ans d’emprisonnement et d’une peine de 75.000 euros d’amende (article 227-23 du Code pénal)

 

Lorsque l’image ou la représentation concerne un mineur de quinze ans, ces faits sont punis même s’ils n’ont pas été commis en vue de la diffusion de cette image ou représentation.

 

–       le fait soit de fabriquer, de transporter, de diffuser par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support un message à caractère violent, incitant au terrorisme, pornographique, y compris des images pornographiques impliquant un ou plusieurs animaux, ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine ou à inciter des mineurs à se livrer à des jeux les mettant physiquement en danger, soit de faire commerce d’un tel message, est puni de 3 ans d’emprisonnement et de 75.000 euros d’amende lorsque ce message est susceptible d’être vu ou perçu par un mineur (article 227-24 du Code pénal).

 

Quelques exemples de condamnations en cas de revenge porn :

 

Jugement du Tribunal correctionnel de Pau du 18 août 2020 : le prévenu a été condamné à une peine de 6 mois d’emprisonnement avec sursis probatoire (obligations de soins, interdiction de contacter la victime et obligation d’indemniser la victime) ;

Jugement du Tribunal correctionnel de Nevers du 24 mars 2021 : le prévenu a été condamné à une peine de 4 mois d’emprisonnement avec sursis et à verser la somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts à la victime ;

Jugement du Tribunal correctionnel de Saint Pierre er Miquelon du 25 mai 2021 : le prévenu a été condamné à une peine de 18 mois de sursis probatoire et à verser la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts à la victime ;

 

 

IV- Que faire en cas de menace de diffusion de contenus à caractère pornographique ?

 

L’article 312-10 du Code pénal prévoit que le fait d’obtenir, en menaçant de révéler ou d’imputer des faits de nature à porter atteinte à l’honneur ou à la considération (par ex : une photo ou une vidéo intime), soit une signature, un engagement ou une renonciation, soit la révélation d’un secret, soit la remise de fonds, de valeurs ou d’un bien quelconque constitue l’infraction de chantage punissable d’une peine de 5 ans d’emprisonnement et de 75.000 euros d’amende.

 

Attention ! Lorsque l’auteur du chantage a mis sa menace à exécution, la peine est portée à 7 ans d’emprisonnement et à 100.000 euros d’amende selon l’article 312-11 du Code pénal.