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I- La définition du défaut d’intention matrimoniale

 

Aux termes de l’article 146 du Code civil :

 

« Il n’y a pas de mariage, lorsqu’il n’y a point de consentement. »

 

Si les époux doivent être sains d’esprit et répondre à l’Officier de l’état civil en pleine connaissance de l’acte qu’ils passent, ces derniers doivent également être animés d’une véritable intention matrimoniale, sous peine de nullité absolue du mariage.

 

Le principal critère d’appréciation de cette intention matrimoniale est la communauté de vie. (Cass., Civ 1ère, 9 juillet 2008, n°07-19.079)

 

La communauté de vie ne signifie pas pour autant cohabitation. (Cass., Civ 1ère, 12 octobre 2011, n° 10-21.914)

 

Toutefois, l’absence de cohabitation peut être justifiée par des motifs légitimes. (Cass., Civ 1ère, 12 octobre 2011, n°10-21.914)

 

Attention ! L’intention matrimoniale ne se limite pas à la seule volonté de fonder une famille, mais s’étend à la volonté d’exercer les droits nés du mariage et de se soumettre aux obligations matrimoniales : respect, fidélité, secours, assistance, au sens de l’article 212 du Code civil.

 

Il sera question de mariage simulé / mariage blanc, lorsque les époux se prêtent à la cérémonie du mariage, en vue d’atteindre un but étranger à l’union matrimoniale.

 

Par exemple, le défaut d’intention matrimoniale a été retenu lorsque le mariage est célébré dans le seul but :

  • d’obtenir un titre de séjour (Cass., Civ 1ère, 6 juillet 2000, n° 98-10.462) ;
  • d’acquérir la nationalité française. (CA de Grenoble, 3 novembre 1998)
  • d’obtenir des avantages matrimoniaux (Cass., Civ 1ère, 28 octobre 2003, n°01-12.574) ;
  • de fins purement successorales (Cass., Civ 1ère, 1er juin 2017, n°16-13.441)

 

Il en va de même, lorsque l’un ou les époux recherchent un but qui n’est pas étranger au mariage, (ex : la protection patrimoniale du conjoint), mais sans pour autant avoir l’intention de se soumettre à toutes les obligations et devoirs du mariage.

 

La détermination des buts véritablement poursuivis par les époux relève de l’appréciation souveraine des juges du fond. (Cass., Civ 1ère, 12 novembre 1998)

 

Il appartiendra à l’époux de bonne foi d’apporter la preuve du défaut d’intention matrimoniale de son conjoint.

 

L’attitude des époux après la cérémonie sera souvent déterminante, notamment en l’absence de consommation du mariage (Cour d’Appel de Toulouse, 31 mars 2009, RG n° 07/05415)

 

 

II- Le défaut d’intention matrimoniale, cause de nullité absolue du mariage

 

Aux termes de l’article 184 du Code civil :

 

« Tout mariage contracté en contravention aux dispositions contenues aux articles 144, 146, 146-1, 147, 161, 162 et 163 peut être attaqué, dans un délai de trente ans à compter de sa célébration, soit par les époux eux-mêmes, soit par tous ceux qui y ont intérêt, soit par le ministère public. »

 

Certaines causes de nullité absolue tiennent aux époux, à l’instar du défaut d’intention matrimoniale.

 

Les deux époux peuvent agir en nullité, même celui qui est à l’origine de la nullité.

 

La qualité d’époux dispense le demandeur d’avoir à justifier d’un intérêt.

 

Cette qualité s’apprécie au moment de l’action.

 

L’action appartient également à tous ceux qui ont un intérêt : sont notamment recevables à agir les ascendants et les autres membres de la famille des époux.

 

Le procureur de la République peut et doit demander la nullité du mariage en présence d’un défaut d’intention. (Cour d’Appel d’Angers, 17 mars 2009 – Cour d’Appel de Rennes, 17 mars 2009)

 

Attention ! L’action en nullité doit être engagée dans le délai de 30 ans suivant la célébration du mariage.

 

Les deux époux doivent être mis en cause, sous peine d’irrecevabilité de la demande.

 

 

III- Les effets de la nullité du mariage pour défaut d’intention matrimoniale

 

En principe, la nullité du mariage pour défaut d’intention matrimoniale engendre l’anéantissement rétroactive des effets du mariage.

 

Le mariage nul est ainsi réputé n’avoir jamais eu lieu.

 

Il sera donc par exemple impossible pour un conjoint de reprocher à l’autre un manquement aux obligations du mariage ; la nationalité française obtenue en raison du mariage tombera ; toutes les donations au dernier vivant et avantages matrimoniaux consentis seront annulés ; il en va de même de la vocation successorale liée à la qualité de conjoint survivant.

 

Les époux sont donc censés ne jamais avoir été mariés, ils retrouvent le statut de célibataire. Les liens d’alliance et tous les avantages tirés du régime matrimonial disparaissent. Ainsi, en cas d’acquisition de la nationalité par un étranger ayant épousé un français, elle est alors caduque (sauf si la personne étrangère était de bonne foi).

 

Le mariage peut cependant être considéré comme putatif à l’égard du ou des époux de bonne foi, c’est-à-dire le mariage ne sera annulé que pour l’avenir.

 

La bonne foi est présumée exister à charge pour celui qui la conteste de rapporter la preuve contraire.

 

La bonne foi doit avoir existé au moment de la cérémonie.

 

Toutefois, la nullité du mariage est sans incidence sur la filiation des enfants issus de l’union des époux : les parents restent titulaires de l’autorité parentale et continue de l’exercer conjointement.

 

Si les deux époux sont considérés de bonne foi, alors tous les effets du mariage qui se sont déjà produits sont maintenus à l’égard de chacun d’eux.

 

Si un seul époux est reconnu comme tel, il gardera seul le bénéfice des effets du mariage déjà produit, tandis que le mariage sera rétroactivement annulé à l’égard de l’autre.

 

 

VI- La répression de la célébration du mariage pour défaut d’intention matrimoniale

 

Aux termes de l’article L. 823-11 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :

 

« Est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende le fait, pour toute personne, de contracter un mariage ou de reconnaître un enfant aux seules fins d’obtenir, ou de faire obtenir, un titre de séjour ou le bénéfice d’une protection contre l’éloignement, ou aux seules fins d’acquérir, ou de faire acquérir, la nationalité française. Ces peines sont également encourues lorsque l’étranger qui a contracté mariage a dissimulé ses intentions à son conjoint.

Ces mêmes peines sont applicables en cas d’organisation ou de tentative d’organisation d’un mariage ou d’une reconnaissance d’enfant aux mêmes fins. »

 

Aux termes de l’article L. 823-12 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :

 

« Est punie de dix ans d’emprisonnement et de 750 000 euros d’amende toute personne qui commet le délit défini à l’article L. 823-11 lorsque les faits sont commis en bande organisée. »

 

Aux termes de l’article L. 823-13 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :

 

« Les personnes physiques condamnées en application des articles L. 823-11 ou L. 823-12 encourent les peines complémentaires suivantes :

1° L’interdiction de séjour pour une durée de cinq ans au plus ;

2° L’interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d’exercer l’activité professionnelle ou sociale à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise, sous les réserves mentionnées à l’article 131-27 du code pénal. »

 

Aux termes de l’article L. 823-14 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :

 

« Outre les peines complémentaires prévues à l’article L. 823-13, les personnes physiques condamnées en application des articles L. 823-11 ou L. 823-12 encourent la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu’en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. »

 

Aux termes de l’article L. 823-15 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :

 

« Les étrangers condamnés en application des articles L. 823-11 ou L. 823-12 encourent l’interdiction du territoire français :

1° Pour une durée de dix ans au plus, en cas de condamnation en application de l’article L. 823-11 ;

2° A titre définitif, en cas de condamnation en application de l’article L. 823-12. »